Voyager au Cap Vert……la découverte d’un petit pays à la musicalité singulière
Quelle est la première chose que l’on fait au retour d’un voyage au Cap Vert ?
L’une des réponses les plus probables sera d’écouter en boucle votre nouvelle playlist des plus belles musiques du Cap Vert tout en répétant les déhanchés pétulants appris par votre hôte d’un soir, le temps d’une nuit chez l’habitant ! Car la musique au Cap Vert est un limon fertile dans lequel poussent des partitions ensoleillées, au pays où la pluie se fait pourtant désirer avant d’offrir la beauté du vert que revendique son nom.
S’imprégner de sa musique offre une authentique façon de voyager au Cap Vert et cela pourrait paraître présomptueux mais il n’est pas osé d’affirmer que la musique du Cap Vert a le pouvoir de transcender tous ceux qui l’écoutent.
Beaucoup de voyageurs connaissent Césaria Évora, la « diva aux pieds-nus », cependant rares sont ceux à imaginer toute la richesse et la diversité de la musique du Cap Vert, ainsi que sa pléïade d’artistes… mais quelles sont réellement les origines de cette exception culturelle ? Morna, Coladeira, Funana, Batuque ou Cola Sanjon pour ne citer que les plus connus… Comment s’y retrouver dans le florilège de genres musicaux que l’on peut découvrir lors d’un voyage au Cap Vert ?
Dans le sillage de Césaria Evora, la plus célèbre ambassadrice du Cap Vert, qui sont aujourd’hui les auteurs contemporains de la musique cap-verdienne ? Enfin, je vous propose un voyage à la découverte des autres cimboa, ferrinho, viola ou encore cavaquinho… ces instruments de musique que l’on retrouve au Cap Vert et qui, avec la connivence d’un bon grog et surtout de la ferveur locale si contagieuse, auront immanquablement le pouvoir de désinhiber les danseurs les plus introvertis !
Vous trouverez ici toutes les informations pour vous mettre au diapason de la musique du Cap Vert avant d’y voyager !
La musique au Cap Vert : Une inspiration forgée dans le métissage
Le Cap Vert, cet archipel sahélien au large du Sénégal, petits confettis au milieu de l’océan, était encore inhabité avant sa colonisation par les portugais au milieu du 15ème siècle. Malgré une terre volcanique peu hospitalière et un climat semi-désertique ingrat, les îles du Cap Vert sont rapidement devenues, de par leur position au cœur de l’atlantique, un carrefour idéal pour organiser le regroupement des esclaves venus d’Afrique et en assurer le commerce vers l’Europe et les Amériques.
Le peuplement du Cap Vert est le fruit de ce commerce triangulaire, qui de génération en génération a orchestré un grand brassage ethnique entre continents jusqu’au profond métissage de la population. L’alliage fécond de tant d’origines et de cultures différentes est sans conteste l’explication la plus évidente de l’étendue des influences musicales dont a bénéficié le Cap Vert tout au long de son histoire. A travers le syncrétisme multi-culturel des inspirations les plus variées de la musique cap-verdienne, on retrouve une hérédité non seulement européenne (inspirée par le fado, la mazurka, la valse, ou encore la polka…), mais aussi africaine (avec par exemple le Lundum : un style de musique et de danse venu d’Angola) ainsi que brésilienne (avec la samba et la bossa) ou encore et dernièrement caribéenne (par le merengue et le zouk).
Cette fusion des genres et des origines se retrouve évidemment dans la remarquable diversité des instruments utilisés au Cap Vert où les percussions africaines telles le Bombolong, ou encore brésiliennes comme le Surdo, donnent le tempo aux instruments venus d’Europe (accordéon, trompette ou guitares de toutes tailles…). De concert, réduite par méconnaissance au style créole par les néophytes, la musique au Cap Vert est indifféremment chantée en « kriol », portugais, français ou anglais.
La musique aux sources de l’identité du Cap Vert
Lors d’un voyage au Cap Vert, il est frappant de constater que la musique y est sans conteste, l’expression populaire à travers laquelle le peuple du Cap Vert s’identifie le mieux. Elle rassemble autant les exilés de la diaspora (près de 50% de la population du Cap Vert a émigrée) que les habitants de chaque île de l’archipel. A l’instar de la Capoeira au Brésil, la musique au Cap Vert est plus qu’un art, elle est fondatrice d’une identité ! Car au Cap Vert, la musique est devenue un véritable symbole de lutte pour l’indépendance. Flagellée par un passé colonial et esclavagiste d’une rudesse sans commune mesure, la population du Cap Vert a en effet trouvé dans la musique une véritable source d’évasion et de lutte pour sa liberté.
Textes et paroles de chansons stigmatisaient par exemple, après la famine de 1949, l’émigration forcée des cap-verdiens vers les îles de Sao Tomé et Principe où les colons portugais les forçaient à travailler aux plantations dans d’effroyables conditions : un terreau qui nourrira dix ans plus tard les premières luttes armées, et mènera jusqu’à l’indépendance du pays en 1975.
La souveraineté désormais acquise, la musique permet aujourd’hui le travail de la remémoration sans lequel il n’y aurait pas de nation. La « sodade », ce sentiment propre à la culture du Cap Vert exprime assurément cette amour du pays à travers la mélancolie de l’exil, la nostalgie du passé et l’espoir du lendemain… En définitive, un voyage au Cap Vert vous permettra la découverte de son identité par la Voie mélodieuse.
La musique comme art de vivre
Au-delà de l’exceptionnelle diversité d’influences et de la prééminence de la musique au fondement de la capverdianité, c’est son imprégnation dans l’ADN des habitants qui rend la musique du Cap Vert si unique. Lors d’un voyage au Cap Vert avec Rencontres au bout du monde, vous constaterez que tout bon cap-verdien qui se respecte ne remet jamais au lendemain l’urgence de chanter et de danser ! La musique accompagne chaque instant et le chant fait partie du quotidien, quant à jouer d’un instrument de musique, ils ont ça dans le sang ; au Cap Vert, c’est comme savoir faire du vélo, ça s’apprend tout jeune et ça ne se perd pas…
Jouée aussi bien au coin de la rue, dans de petits kiosques à musique, aux terrasses des café-restaurants ou dans les cours d’hôtels vous serez épatés par la propension des habitants du Cap Vert à pousser la chansonnette à la moindre opportunité.
Pour vivre une expérience authentique, rien de tel que de s’installer à la terrasse d’une churasqueira (brasserie de grillades) dans les rues colorées de Mindelo, surnommée la petite Havane, ou de Praïa, la capitale, et se laisser transporter par l’interprétation de l’une de ces morna qui vous donne le vague à l’âme. Vous ressentirez alors toute la puissance et la beauté mélancolique de ce chant qui vous fera un temps voyager dans les tourments de l’existence, jusqu’aux brumes de l’exil, puis bercer dans l’espoir feutré d’un amour retrouvé. Mais attention, comme Vladimir Monteiro l’explique dans son excellent livre « Les musiques du Cap Vert » (Éd. Chandeigne) :
La nostalgie n’entre que pour une part dans les compositions ; la satire, la sensualité et la gouilleuse jubilation lui donnent la réplique. Ce sont elles qui mènent la danse. On peut bien entendre le chanteur se plaindre des tourments de l’amour ou de son départ à Sao Tome et Principe, des dangers équatoriaux qui le guette las-bas, les danseurs en couple collé-serré ne se privent pas de chalouper. Tel est le paradoxe jouissif de la musique cap-verdienne. Tristesse et énergie vitale font bon ménage. Traditions profondes et modernité pratiquent l’union libre.
Seul un voyage au Cap Vert au plus près des habitants pourra vous permettre de véritablement ressentir intensément cette atmosphère si particulière : la promesse d’une expérience musicale et humaine indélébile.
Les différents genres musicaux du Cap Vert
Vous l’avez compris, la musique au Cap Vert regorge d’apports multiples ayant tout naturellement inspiré une multitude de genre musicaux.
Lors d’un voyage au Cap Vert, vous découvrirez bien entendu la Morna, la musique emblématique du pays mais également, la Coladeira sa version plus accélérée, le Funana, le Batuque ou éventuellement la Cola Sanjon…
La Morna
Ce genre musical unique fut révélée sur l’île de Brava au début du 20è Siècle par le compositeur Eugénio Tavares (1867-1930), un fils de colon portugais. Intellectuel reconnu de son époque, il sera l’un des premiers à affirmer l’existence d’une identité créole alors que le pays est encore en pleine tutelle coloniale. Cet outrage lui coutera une mise en sourdine forcée, manifestée par un exil vers les États-Unis ; il s’inscrira néanmoins quelques années plus tard comme l’un des actes fondateurs de la culture du Cap Vert dès lors que l’icône du pays, la bien nommée Césaria Évora en popularisera le genre unique aux quatre coins du monde avec le célèbre titre « Sodade ».
On dit que la Morna raconte encore mieux que les mots l’histoire du Cap Vert… Ouverte au dialogue, elle a su intégrer toutes les influences, en se recréant sans cesse. Chantée principalement en créole et en portugais, les couplets et refrains de la Morna entonnent préférentiellement les amours perdus, le mal du pays et l’exil du Cap Vert. Nombreuses paroles témoignent en outre des difficultés éprouvées par des conditions de vie rendues difficiles en raison de la sécheresse du climat et de l’isolement insulaire que vivent les habitants. La meilleure des Morna est celle capable de totalement soumettre le spectateur à la volonté de son protagoniste, celle qui déchire les cœurs et transperce les âmes ; mais gardez-vous bien de dire que la Morna est triste, comme aime à le préciser le musicien Jorge Silva :
Le Cap-verdien reste quelqu’un qui garde toujours espoir en dépit des conditions difficiles de son pays, c’est un éternel rêveur qui attend toujours un jour meilleur alors qu’un peuple triste ne rêve pas. Un peuple qui espère ne peut pas chanter la tristesse.
Les instruments de prédilections de la morna sont la guitare classique (le violão), le cavaquinho (une petite guitare à quatre cordes); le violino (violon) et la viola (une guitare portugaise bien particulière avec 4 cordes et qui est très utilisé à Madere), dont les partitions s’accordent sur des rythmes doux à la mélopée enivrante.
Aujourd’hui inscrite par l’Unesco sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité (décembre 2019) la Morna est l’une des plus grandes fiertés du « petit pays » : passée d’un style musical portuaire inspiré de l’étranger elle est devenue l’hymne de toute une nation. Compagnon de voyage des cap-verdiens exilés comme insulaires, c’est un chant dont la présence est constante dans la vie d’un cap-verdien. La Morna est bien l’âme du Cap Vert comme aimait à le répéter Césaria Évora.
Pour une version de Morna plus accessible aux oreilles francophones, je vous invite à l’écoute de la suave Nancy Viera, une autre égérie de la musique capverdienne, avec son titre « Les lendemains de Carnavals ».
La Coladeira
Version accélérée et dansante de la morna, la Coladeira est son pendant joyeux et satirique. Apparue dans les années 1930 à São Vicente ce genre musical plus récent se caractérise également par sa rupture avec les thèmes mélodramatiques de la morna. Les compositeurs doivent faire rire et abordent non sans moqueries des sujets modernes ou d’actualités. Plus festive que sa cousine, elle est un appel à celles et ceux qui veulent danser, notamment la Passada une danse d’origine angolaise (Kizomba) dont la proximité des danseurs et la sensualité des mouvements font de plus en plus d’adeptes aujourd’hui en Europe.
La composition d’un groupe de coladeira n’est pas rigide. Une groupe de taille moyenne pourra comprendre des guitares de 6 et 10 cordes, d’un cavaquinho (qui joue les accords rythmiquement), un rabeca (violon), un accordéon, clarinette ou trompette et plusieurs instruments de percussion d’origines variées comme le güiro (portoricain), le conga cubain et autres shaker, clochettes, etc.
Bien qu’il serait réducteur de limiter Tito Paris à la Coladeira, il reste néanmoins l’un de ses plus grands artistes contemporains avec par exemple son célèbre titre « Dança mi Criola ». Mariana Ramos, autre interprète plébiscitée au Cap Vert nous offre également avec son Balonce de Coladeira une égayante approche de la Coladeira.
Le Funana
Aux côtés de la morna et de la coladeira, le Funana et l’un des genres musicaux cap-verdien les plus authentiques. Par ses rythmes endiablés, ses danses subjectives et son origine populaire, le Funana est en quelque sorte le Punk cap-verdien !
C’est une musique de révolution et de liberté ! Bien trop subversives pour les colons portugais elle sera interdite publiquement dans les années 1960. Les bals de Funana s’organisaient donc de manière clandestine aux sons du Gaita (accordéon diatonique) et du ferrinho (racle composée d’un couteau frotté le long d’une barre de fer).
A nouveau autorisé à l’indépendance du pays, le Funana connaîtra pourtant une mutation importante avec l’essor du groupe Bulimondo qui lui popularisera des sonorités électriques d’avantages conformes aux aspirations de l’époque. De nos jours, la chanteuse Lura est probablement l’une de ses meilleures héritières avec par exemple son titre « Fitiço Di Funana » ; mais le Funana connais encore plus récemment de nouvelles mutations avec l’arrivée de l’éléctro. Il revient notamment en force auprès des jeunes adolescents cap-verdiens, assurément les seuls ayant l’énergie pour se trémousser sur de tels rythmes ! Si votre voyage au Cap Vert fait escale à Praia, faites un saut à proximité du marché de Sucupira, en contrebas du quartier central du Plateau, il y est fréquent de voir les jeunes s’entrainer et faire des « battles » ou chorégraphies de Funana. Gare à vous, ça détonne !!!
Le Batuque
Le Batuque est probablement la tournure artistique la plus fidèle à l’authenticité du peuple cap-verdien. Né sur la côte africaine et aujourd’hui ancré principalement sur l’île de Santiago, le Batuque est un genre musical percutant, joué traditionnellement par les femmes lors des fêtes familiales, les mariages ou les baptêmes. Historiquement, le Batuque était accompagné par certains instruments comme la flûte, la guitare et le cimboa (cordophone frotté originaire d’Afrique), seulement les portugais ayant interdit les tambours dans une stratégie de déculturation, l’habitude est venue de donner la mesure, en tapant des mains sur un paquet de tissus coincé entre les jambes. Le Batuque se joue en cercle au centre duquel les femmes improvisent à tour de rôle des danses frénétiques et des chants repris énergiquement en cœur par l’assistance.
La pratique du Batuque revêt en réalité un important rôle social basé sur l’entraide féminine. Ses thèmes favoris reprennent les remous des affres de la vie quotidienne, le travail aux champs mais il est en définitive un véritable espace de liberté où les femmes en profite pour plaisanter, railler leurs proches ou l’occasion encore de s’échanger entre filles de nombreux conseils sur la vie conjugale et sexuelle.
Peu enclin à tolérer une telle émancipation et des comportements jugés alors trop érotiques, l’Église et l’administration tentèrent, sans véritable succès, d’en interdire la pratique au Cap Vert en 1866. Cette prohibition avortée n’a rien d’étonnant quand on mesure aujourd’hui la ferveur, l’enthousiasme et l’exaltation qui habitent toujours les cap-verdiennes lorsqu’elles s’adonnent à un Batuque ; même après une journée de dur labeur, elles trouvent encore une énergie phénoménale pour se relayer dans une danse frénétique dont l’apogée est marqué par une accélération significative du rythme des battements. Le spectacle et l’ambiance ainsi générée occasionnent parfois au plus profond des ribeiras de Santiago des épisodes de transes aux pulsions africaines éruptives ! Participer à un batuque est assurèment l’une des expériences les plus magique d’un voyage au Cap Vert. De par sa complicité avec les populations locales, Rencontres au bout du monde vous permettra assurément de vivre cette expérience unique, en particulier dans le village de Longueira sur l’île de Santiago où vous serez hébergé chez certaines femmes du groupe « Finca pé ».
La Cola Sanjon
La Cola Sanjon est probablement la créativité musicale la plus ancienne du Cap Vert, considérée elle-même comme l’ancêtre du batuque. Ses origines remontent en effet à l’arrivée des premiers esclaves au Cap Vert, elle présente en outre de fortes similarités avec des danses d’esclaves retrouvées au Brésil ou aux Caraïbes. Elle est aujourd’hui profondément enracinée dans toutes les îles de l’archipel mais c’est sur Santo Antao que vous pourrez assister aux plus ferventes démonstration de cet art ancien.
La Cola Sanjon est un style musical très populaire qui se dédouane de tout ordonnancement particulier. Les musiciens se contentent simplement de respecter les traditions ancestrales transmises de génération en génération. Vous ne verrez d’ailleurs aucun spectacle de Cola Sanjon sur scène, celle-ci se jouant principalement dans les rues, plus particulièrement le 24 juin lors de la fête de la Saint Jean.
Musique cadencée au rythme simple et répétitif du tambour Tatata tacatacata… Tatata tacatacata…, son style aux sonorités festives est facilement identifiable par ses adeptes qui ne tardent jamais à se joindre à la danse. Celle-ci s’exécute en duo de couples de sexes opposés ou entre femmes. Les danseurs font quelques pas chacun de leur côté puis se rejoignent parfois très énergiquement, en unissant leurs bassins et en se simulant l’acte sexuel puis se séparent. Cette danse est si suggestive que les autorités coloniales l’avaient en son temps interdite à l’instar du Funana ou du Batuque, mais la ferveur communautaire du Cap Vert et son amour pour les musiques et danses populaires auront une nouvelle fois eu raison de ses détracteurs.
Les autres genres musicaux
Ce petit inventaire des styles musicaux retrouvés au Cap Vert, ne pourrait s’exempter des nombreux autres styles et rythmes musicaux joués sur certaines îles, de manière plus ponctuelle ou confidentielle : la mazurka, la valse, le galope, la toada, le chorinho, la contredanse, le rabolo, la polka, le fox ou encore, plus rarement, le tango, sans oublier les musiques de carnavals comme la Batucada ou les nombreuses fêtes populaires et religieuses que l’on rencontre au Cap Vert tout au long de l’année. Rien que d’assister à la messe du dimanche, même si l’on n’est pas pratiquant, est une magnifique opportunité pour s’imprégner de la musicalité Cap-verdienne !
Une production contemporaine florissante au brassage ininterrompu
Certes, l’ombre de Césaria Evora continue de planer sur les artistes cap-verdiens pour qui il n’est pas toujours évident de se faire une place sur les scènes internationales. « Nous n’avons pas de budget pour promouvoir nos artistes à l’export », avoue le ministre de la Culture, Mario Lucio. Pourtant, la production musicale du Cap Vert n’a jamais été aussi florissante avec en moyenne la sortie d’une demi-douzaine d’albums par mois. Il va sans dire que les nombreuses radios capverdiennes n’ont pour leur part aucune difficulté à abonder les ondes de musique locale. Mais au-delà d’une longue maturation populaire et métissée c’est très probablement son absence d’exigence commerciale qui rend la musique du Cap Vert si disruptive, si riche et si variée.
Avec bientôt six siècles d’existence, son identité musicale évolutive est loin d’être menacée. La morna a beau être désormais inscrite dans le marbre au patrimoine de l’UNESCO, les nouvelles générations d’artistes cap-verdiens, à l’image de Mayra Andrade dont la notoriété est encore pleine de promesses, continuent de proposer des œuvres originales transpirant ce fascinant héritage culturel que les Césaria Evora, Tito Paris, Lura, Sara Tavares et autre Mariana Ramos ont pu leur léguer, tout en y inséminant des influences nouvelles et exotiques. Quoi de plus représentatif que cet entrainant titre aux accents de pop tropicale que Mayra Andrade nous propose avec son « Ilha de Santiago » dont le clip marque un attachement ombilical à ses racines et qu’elle décrit elle-même comme son « hommage aux musiciens de l’île de Santiago mais aussi à l’authenticité, à la bienveillance et à l’espoir qui caractérise le peuple cap-verdien ».
Ces valeurs humanistes sont indéniablement celles que Rencontres au bout du monde tâche de faire vivre humblement à ses voyageurs dans ce si beau pays ou la musique est comme une deuxième langue vivante, facilitant les échanges et la communion.
Bibliographie
- Gérald Arnaud et Henri Lecomte, « Le Cap-Vert », Musiques de toutes les Afriques, Fayard, Paris, 2006, p. 142-148 (ISBN2-213-62549-2)
- Vladimir Monteiro, Les musiques du Cap-Vert, Chandeigne, Paris, 1998, 156 p. (ISBN2-906462-48-9)
Yoann Vieil